Camille Goret
Kaboul: Mariam (prénom d’emprunt) milite dans un groupe féministe en Afghanistan. D’après la Revolutionary association of the women of Afghanistan (RAWA), peu de choses ont changé depuis le renversement des Talibans. Pour que la situation évolue, l’association appelle l’otan à ne plus intervenir dans la politique afghane.
Huit après le renversement des Talibans, la situation des femmes s’est-elle améliorée en Afghanistan?
«L’arrivée des troupes de l’Otan n’a pas changé grand-chose. Les quelques évolutions remarquéessont essentiellement symboliques. Elles visent surtout à satisfaire la communauté internationale en lui montrant que les femmes sont devenues plus libres! Mais si on se penche sur le sort des femmes dans leur vie quotidienne, le constat est fort différent. Les viols, enlèvements et violences domestiques restent monnaie courante. On ne peut pas dire que la vie soit meilleure.»
L’action de la communauté internationale est inefficace?
«Rien ne changera tant que le pays ne sera pas libre. Nous souffrons de problèmes économiques, de problèmes sociaux, de corruption... On ne peut pas dire que les femmes soient libres dans un tel environnement. La guerre faite aux Talibans n’a rien changé sur le fonds du problème, elle n’a fait qu’ajouter à la situation existante les dangers qui vont avec toute guerre. Maintenant, on vit avec la crainte supplémentaire des bombardements et des détentions arbitraires.»
Toute amélioration du sort des femmes doit donc passer par une évolution globale de la situation?
«La lutte en faveur de la démocratie et des droits des femmes ne peut être séparée de la lutte contre le fondamentalisme et l’ignorance. La société afghane est très fermée, et souffre d’un manque énorme d’éducation. C’est pourtant un élément clépour faire changer une société. Nous tentons de donner une éducation aux femmes via les écoles et des ateliers à la maison, car c’est cela qui ferachanger les mentalités.»
Les autorités actuelles ne travaillent pas en ce sens?
«L’administration afghane est incapable d’assurer la justice. Elle reste sclérosée par le fondamentalisme. Malheureusement, la politique actuelle, cautionnée par la communauté internationale, n’est pas si différente de celle menée par les Talibans en leur temps. Il est essentiel de réaliser notre indépendance. C’est un premier pas qui permettra de mettre en place un gouvernement démocratique, qui ne soutienne pas les seigneurs de la guerre au profit d’intérêts étrangers.
Alors pourra commencer un long processus capable d’assurer l’émancipation des femmes.»